Maurice Allem [1916] (1966)

portrait de Madame de Villedieu

RECHERCHE

Notice présentée par Maxime Cartron

Couverture

ALLEM (Maurice) – Anthologie poétique française. XVIIe siècle, t. II, Paris, Garnier-Flammarion, 1966 [1916], p. 293 :



   Marie-Catherine-Hortense Desjardins naquit en 1632 à Alençon. Son père était officier et sa mère femme de chambre de Mme de Montbazon. Mlle Desjardins était intelligente, elle avait de l’inclination pour les lettres, elle montrait beaucoup de vivacité et même de nervosité dans les manières et une imagination très ardente. Tallemant dit d’elle : « C’était une personne toute petite, qui avait beaucoup de feu ; elle parlait sans cesse. » Voiture prédit qu’elle aurait beaucoup d’esprit, mais qu’elle serait folle. Elle ne devint pas folle, mais elle fut toujours fort agitée. Elle joua d’abord la comédie et parcourut la province avec une troupe de comédiens ; elle vint ensuite à Paris, trouva des protectrices en Mme de Montbazon et de Chevreuse, commença d’écrire et de mener une existence galante, et devint rapidement célèbre tant par ses galanteries que par ses écrits. Elle eut de nombreuses liaisons, dont une, et la plus fameuse, avec M. de Villedieu, capitaine d’infanterie, qu’elle rencontra dans un bal. Il promit, dit-on, de l’épouser, mais il était marié déjà ; dans cette situation il s’enfuit à Cambrai, où elle le suivit, habillée en homme, résolue à lui demander raison les armes à la main. Au lieu de se battre, ils se réconcilièrent, passèrent en Hollande, puis revinrent, après avoir été unis par un prêtre hollandais. Mlle Desjardins se prétendit, dès lors, mariée à Villedieu ; lui n’en convenait pas. En tout cas elle prit le nom de Mme de Villedieu, et c’est sous ce nom que l’on se souvient d’elle. Cette union ne fut pas parfaite ; les deux époux furent infidèles l’un à l’autre ; néanmoins, quand Villedieu fut tué à la guerre, sa femme en eut un tel deuil qu’elle se retira dans un couvent ; on l’en fit sortir quand on y connut sa vie scandaleuse ; rendue à l’air du siècle, elle reprit son existence passée ; elle faillit se remarier avec un gentilhomme sexagénaire, M. de La Chasse, mais celui-ci aussi se trouvait marié déjà. Il mourut d’ailleurs bientôt. Mme de Villedieu finit par retourner au lieu de sa naissance, où elle épousa, véritablement cette fois, un sien cousin qui avait été autrefois le premier objet de ses amours. Elle mourut en 1683. Comme écrivain, elle a laissé de nombreux ouvrages : romans, pièces de théâtre (tragédies et tragi-comédies), poésies et lettres. Ses poésies comprennent des églogues, des sonnets, des madrigaux, des fables, etc. On y trouve des galanteries d’un ton précieux, et aussi des vers d’amour qui manifestent une passion ardente.